Échos du Bosphore, Istanbul (Turquie)
Workshop photo | septembre 2024
Istanbul
François Dancette
Lever de soleil sur le Bosphore : Istanbul s’éveille, tandis qu’un ferry — moyen de transport privilégié — se détache de son embarcadère sur fond de lumière dorée. Très tôt déjà, les pêcheurs ont pris place sur le pont Galata, image emblématique et authentique de la ville. L’un d’eux grignote son casse-croûte, indifférent aux passages bruyants des tramways dont la publicité tombe ici à pic.
Un peu plus tard, nous embarquons sur un ferry. On y côtoie des travailleurs qui terminent leur nuit, en route vers l’autre rive de la Corne d’Or ou vers la rive asiatique. Les enfants se rendent à l’école, les vieillards voyagent aussi, baignés dans des lumières rasantes et contrastées. Les ferries transportent également du ravitaillement pour les îles.
Peu à peu, la ville s’anime. Les commerces s’ouvrent et l’on découvre l’Istanbul moderne, où s’affiche la commémoration du centenaire de la République fondée par Atatürk. Dans les rues, les vendeurs ambulants se multiplient : maïs, châtaignes, bouteilles d’eau, glaces… Partout, les drapeaux rouges ponctuent le ciel et les façades, notamment sur la place Taksim, témoignant d’un nationalisme bien présent.
Les scènes de travail dans la rue sont innombrables : réparateurs de vélos, marchands de fruits et légumes, gargottes, fabriques de gözleme dans les marchés, ou encore boucheries. Parallèlement, la religion rythme la vie des Stambouliotes, avec cinq appels quotidiens à la prière. Les ablutions rituelles, normalement réservées aux hommes, attirent parfois aussi les femmes, après la prière.
Istanbul, c’est aussi une ville de contrastes, entre tradition et modernité : une femme voilée en noir passe devant une boutique de mariage d’inspiration occidentale. En fin d’après-midi, lorsque la chaleur retombe, les anciens se retrouvent dans la rue pour discuter, fumer, ou faire la sieste. Les chats, protégés dans la ville, se désaltèrent à une fontaine, tandis que les chiens — et parfois même certains hommes — dorment à l’ombre.
Les femmes, de leur côté, s’accordent aussi des moments de détente, souvent avec les enfants, mais sans se mélanger aux hommes. Sur la place Eminönü, les enfants nourrissent les pigeons, tandis qu’un vendeur de rue propose des billets de tombola. À quelques pas, les contrastes sautent encore aux yeux : boutiques de luxe et modestes marchands de maïs grillé ou de châtaignes se côtoient, avec pour fil rouge omniprésent… la couleur rouge des drapeaux.
Quand vient le soir, le retour en ferry révèle des silhouettes fantomatiques : les projecteurs éclairent violemment les débarcadères, dessinant des ombres saisissantes. La nuit tombe, et Istanbul bascule dans une autre énergie. La jeunesse fait la fête, tandis que les mariés se retrouvent pour des séances photos sous le pont Galata : la boucle est bouclée. Mais les échoppes ambulantes, elles, ne ferment pas, donnant à la ville l’image d’un peuple infatigable, dur à la tâche, et vibrant jusque très tard dans la nuit.