Mentorat photo 2023/2024 | édition n°1

Des bouts de soi
Diane Volle

Mars 2020, comme assise à côté de la nuit, je me retrouve confinée, sans modèle à découvrir, sans paysage à capturer, sans aventure à planifier.

Dans un élan vital, je décide de changer d’angle, de tourner l’appareil photo vers moi. De me regarder. De comprendre ces bouts de moi que je refuse, que mon œil a pris l’habitude de ne jamais regarder. De mettre en lumière toutes ces parties négligées, mal aimées, de comprendre les douleurs et les cicatrices. Mon objectif était de me concentrer uniquement sur ce que je n’aimais pas physiquement, de trouver ce qu’il y avait derrière, psychologiquement. Comprendre les peurs ancrées, les épreuves marquées ici ou là. Raconter une moi qui se voit.

Coincé dans son propre corps, on a parfois du mal à l’accepter, à l’aimer pour ce qu’il est, et surtout pour ce qu’il fait. Me voir sous cet angle, m’a permis d’accepter un peu mieux ces représentations de moi, de confronter mon œil, de me comprendre, m’apprendre. De cette bulle, cette apnée du réel, est ressortie une trentaine de photographies : celles qui tuent le son du doute, celles qui rappellent les évidences.

Confiante et heureuse de ce travail, j’ai décidé de l’étendre à tous les modèles intéressés par ce questionnement sur notre rapport au corps. D’écouter mes modèles, de tisser par la photo, un lien de confiance avec eux, pour comprendre leur histoire joliment dessinée sur leurs corps. Par ce projet, j’espère arriver à dépeindre la couleur sous le noir et blanc. Raconter avec justesse chacun des récits qui me sera confié. Capter l’émotion du moment. Offrir un espace d’écoute et de douceur. Capturer les effets du temps, les doutes qui se lisent, les traces, les souvenirs, les cris étouffés derrières les cicatrices.

Entrelacés, ces récits, viennent raconter ce désir de sortir du cadre établi, de s’échapper de cette sensation de vivre à côté de son corps. Après avoir creusé sous les fards, arriver à l’aimer tout entier. Par une image se sentir léger, connecté, entier. Et finir cette rencontre avec moi, avec soi en se disant : « cher Corps, tu as été et tu seras toujours suffisant ».

Des bouts de soi,

Ce sont nos cœurs et nos corps.

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